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Crossroads avec Claron McFadden

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Un festival au carrefour des influences

Découvrez le thème du Klarafestival 2024

« Je me tiens à un carrefour et j’essaie de rester au milieu du trafic, au centre, là où les styles et les générations se croisent, se rencontrent, se heurtent et, à partir de ce point, suivent leur propre voie. »

— Claron McFadden

 

Crossroads : ce mot m’est venu à l’esprit dès les premiers entretiens avec Claron McFadden, artiste du festival. Sa carrière ne traduit-elle pas sa volonté de faire converger les univers musicaux les plus divers ? La célèbre musicienne s’illustre à la fois dans le répertoire ancien et contemporain. McFadden fait aussi souvent le lien avec le théâtre. Enfant, elle a été biberonnée à la musique gospel et funk, ainsi qu’à celle de Woody Guthrie et des Beatles. Néanmoins, sa formation classique ne l’empêche pas de naviguer entre le jazz et l’improvisation libre.
 

Crossroads est une belle métaphore porteuse d’un symbolisme intéressant. Quand on arrive à un carrefour, on est libre de partir dans toutes les directions. Toutefois, cette latitude nous oblige à faire un choix et à emprunter un des chemins. Même dans les mythes anciens, les carrefours sont comme un entre-deux : on n’est ni ici ni là. Une fois passé le carrefour, un autre monde se dévoile toujours, mais c’est la plongée dans l’inconnu. Cependant, il faut oser traverser. 

 

Avec Claron McFadden pour guide, nous allons explorer quelques carrefours avec la musique traditionnelle d’Europe occidentale. Elle nous réserve un spectacle en forme d’émission de radio autour de la figure vaudevillesque d’Ada « Bricktop » Smith, grande prêtresse de la vie nocturne parisienne dans les années 1920. Claron McFadden s’associe aussi à la nouvelle génération. Avec des étudiants des conservatoires de Bruxelles et de Gand, elle organisera un happening autour de la composition emblématique de Gavin Bryars, Jesus’ Blood Never Failed Me Yet. Enfin, avec l’Ensemble TaCTuS, elle s’immergera dans l’œuvre de David Lang.

 

Une rencontre sous le signe de l’authenticité

 

Là où les chemins se croisent, des rencontres se nouent, tantôt harmonieuses, tantôt conflictuelles. Les deux options peuvent néanmoins s’avérer enrichissantes pour tous les protagonistes. À la croisée des genres et des traditions, la curiosité et l’intégrité sont essentielles. Dans le meilleur des cas, la rencontre est une tentative sincère de se comprendre et de créer un lien pérenne. Le projet Musikaa de Molenbeek, qui clôt en apothéose un chapitre de quatre années, l’illustre à merveille.

 

Ce besoin de créer du lien est viscéralement chevillé au corps de Bruxelles, notre port d’attache, autre carrefour d’une incroyable richesse. La capitale belge reste l’une des villes les plus cosmopolites au monde. Plus de 180 nationalités s’y côtoient et une centaine de langues s’y parlent dans un mouchoir de poche d’à peine 32 km2. En marge de cette diversité culturelle, il y a aussi de grandes disparités économiques entre habitants. Dans ce contexte très diversifié, il est essentiel de toucher un maximum de personnes et de les impliquer.

 

La petite araignée sur ton épaule

 

Willy Malisse, fondateur du centre artistique Limelight à Courtrai, où j’ai commencé ma carrière, m’a dit un jour que lors d’une fête, il fallait « toujours avoir l’impression d’avoir une petite araignée sur l’épaule ». En d’autres termes, il peut toujours y avoir un élément de surprise incongru. Cet inattendu se retrouve aussi dans le programme du Klarafestival. La mission du festival est d’explorer le point de convergence des chemins familiers et de sentiers moins battus, en créant un contexte où le répertoire classique est perçu à travers un prisme plus contemporain.

 

Les artistes de notre programmation 2024 incarnent cette volonté. Tous ont fait le choix délibéré de la musique classique, mais leur approche casse parfois les codes. Ils posent des questions et portent un regard critique sur la musique qu’ils composent ou interprètent. Wim Henderickx est de ceux-là. Inspiré par les différents langages musicaux, il a aussi tenté de les apprivoiser lui-même. Avec le Belgian National Orchestra, nous rendrons hommage à ce compositeur récemment décédé. Dans le projet Ogresse, Cécile McLorin Salvant prendra pour point de départ la forme traditionnelle du cycle de lieder, mais louvoiera musicalement dans le jazz et la chanson française, ainsi que dans la théâtralité de l’opéra. Iván Fischer, quant à lui, fera de la Passion selon saint Matthieu un tremplin pour le projet transversal Compassion, qui s’ouvre à la musique de minorités et de peuples menacés. Ce que tous ces artistes ont en commun, c’est leur générosité et leur ouverture d’esprit. Nous vous invitons à les rejoindre au carrefour de ce festival.

 

Propos de Joost Fonteyne recueillis par Jasper Croonen

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